#1 Wed 27 February 2008 20:01
ENSG / ESGT : la guerre des écoles ?
Lorsqu'on parle de formation en géomatique, on parle beaucoup des sections universitaires, license, et masters. Mais il y a aussi 4 grandes écoles d'ingénieurs en France qui forme des géomaticiens (j'en viens). : l'ESGT, école du CNAM, au Mans, l'ENSG, l'école de l'IGN, à Marne-la-Vallée, l'ESTP, la fameuse école de TP, privée, à Cachan, et l'INSA de Strasbourg.
Jusque là rien de neuf. Or depuis quelque temps déjà, on parle de réseau de formations d'ingénieurs géomaticiens. Il s'agit le plus souvent de quelque chose de vague, avec de nombreux ballons d'essais. Mais depuis peu, une voie a été plus particulièrement entamée : la première année d'ingénieur à l'ENSG se déroulerait à l'ESGT.
De nombreuses interrogations, les premiers intéressés agissent, vont aux réunions, c'est plus ou moins une affaire interne. Mais l'affaire prend une toute autre tourne à partir du 6 février.
L'évènement a lieu sur le blog du syndicat CGT OM de l'IGN. Dans le billet du 6 février, dont le sujet était la cérémonie de remise des diplomes qui avait lieu ce jour-là, on trouve un joli paragraphe :
Les contacts avec l’ESGT ont montré le faible niveau de cette école financée par le patronat du secteur. Ce qui montre au passage que les patrons ne sont pas intéressés à un haut niveau de qualification des salariés mais au strict minimum permettant de faire bosser.
Le directeur de l'ESGT, M. Polidori, professeur titulaire de la chaire de géomatique du CNAM, ne pouvait que répondre. La réponse se trouve dans les commentaires du billet.
On pouvait en rester là, mais non trois jour après, la CGT répondait à M. Polidori. Dans les commentaires de cette réponse, on trouvera un élève de l'ESGT, ardent défenseur de son école, et un ancien élève de l'ESGT, qui lui trouve un certain nombre de choses à dire à propos de l'école (de la rancune à l'encontre de ses anciens camarades qui ne foutaient rien en 3° année ???).
Le billet suivant est un compte-rendu de réunion. Le ton est assez sobre, hormis un joli paragraphe :
D’autres enseignants ont souligné les différences de niveau dans la conception de l’enseignement. Ainsi, une professeure de photogrammétrie a indiqué qu’à l’ESGT, par exemple, on ne faisait pas appel aux matrices dans cet enseignement, alors que l’ENSG et son cycle IT y ont recours.
"Ouh ! Les mauvais de l'ESGT, ils ne savent même pas ce qu'est une matrice !"
Je n'étais pas à cette réunion, mais j'étais à l'ESGT l'année dernière, et les matrices dans la photogrammétrie, les élèves connaissent. Ce n'est peut-être pas le coeur du programme de photogrammétrie de première année, mais ensuite, on y passe, forcément. La formation n'est surement pas la même, mais la différence n'est pas à ce niveau.
Bizarrement, je n'ai pas vu dans cette récente affaire le nom de Michel Kasser, actuel directeur de l'ENSG, ET ancien directeur de l'ESGT, fondateur de l'école sur son site Sarthois (Le Mans est la préfecture de la Sarthe). J'aurais pensé que ce nom serait sorti, ayant vraiment de très bonnes raisons d'être proche de cette école (en sachant qu'il a toute les raisons d'être 'fidèle' à l'ENSG). Mais peut-être qu'après tout il a eu son heure auparavant...
Alors cette guerre des écoles, qui la remportera ? Faut-il l'existence de ce conflit pathétique alors que la géomatique est assez pauvre dans ses formations d'ingénieur ? Écoles en danger ? Écoles cannibales ? Écoles inutiles ? Que nous réservera ce joli débat houleux ?
Jérôme Cuinet
L'avantage de la Chine, c'est que le soleil se couche plus tard !
Hors ligne
#2 Tue 04 March 2008 15:08
Re: ENSG / ESGT : la guerre des écoles ?
ouinn je n'avais pas eu vent de cette affaire là... les couteaux volent bas...
Je suis un ancien de l'ESGT (1993, alors qu'elle était localisée à Evry), j'y ai enseigné les SIG durant 4 ans lorsque j'étais Maître de conférences à l'université d'Angers entre 1998 et 2002. Aujourd'hui, professeur à l'Université Laval et directeur du département des sciences géomatiques, je vois passer chaque année une bonne douzaine de stagiaires et d'étudiants venant en échange depuis les quatre écoles en question (nous avons formellement une convention avec l'INSA, l'ESTP et l'ESGT, comme mous en avons une avec l'EPFL et la polytechnica de Barcelona. En effet, notre département dispense deux formations de premier cycle: une de type B.Sc. en sciences géomatiques qui mène à l'ordre des arpenteurs-géomètres du Québec et l'autre de type B.Ing. en génie géomatique qui est la seule au Québec et l'une des trois au Canada à mener à l'ordre des ingénieurs du Québec (et oui les structures ordinales sont nombreuses au Québec)... Nous serons présent au Géoévènement, disponibles pour parler de tout cela...
Première réaction à chaud, les critiques viennent de sources "syndicales" et qui vraisemblablement ne sont pas du tout en accord avec la décision prise de mutualiser la première année ESGT-ENSG. À titre personnel donc, je respire un grand coup par le nez et je me dis qu'il y du parti pris... et un manque certain d'objectivité dans ces propos. C'est mon côté ancien ESGT. Je ne trouve pas très pertinent en revanche de lancer un débat de ce type en l’intitulant « ENSG / ESGT : la guerre des écoles ? » Il n’y a selon moi aucune guerre des écoles dans cette affaire là, j’y vois seulement l’expression de personnes frustrées par une décision avec laquelle elles ne sont pas en accord.
S'il y a sans doute un fond de vérité, c'est sur les moyens dont dispose l'ESGT, laquelle a toujours été sous-dotée, en particulier en enseignant-chercheurs permanent et ce malgré les engagements qu'avait eu Michel Kasser lors de l'opération de délocation au Mans - ha oui l'école n'a pas été créée au Mans - (dont je vous rappelle, si je ne m'abuse, qu'elle n'était pas le premier choix du directeur de l'époque, lequel souhaitait ardemment que l'ESGT se relocalise à Marne La Vallée) sic... Le ministère n'a pas tenu ses engagements... ou pas totalement.
Sur le niveau général des ces écoles, une chose est certaine: traditionnellement l'ESGT (couplée à l'époque avec l'Institut de Topométrie, l'IT comme on disait et qui a formé l'essentiel des Géomètres-experts encore en exercice) avait pour vocation de former des géomètres-experts justement. Le « niveau théorique général de type ingénieur » y était ( y est encore? je ne peux pas me prononcer) plus faible que dans des écoles comme l’ESTP ou l’INSA (qui était jusqu’il n’y a pas très longtemps l’ENSAIS - une école du concours commun de l’ENSAM…). Dans ces deux écoles les effectifs des filières topos étaient marginaux et les orientations dan sla formation et la culture d’avantage ingénierie qu’arpentage… pour faire simple. Les modes de recrutement même expliquent ce différentiel, mais cela n’implique pas de mon point de vue que les diplômés de l’ESGT ont un faible niveau… Je vois cette différence de formation et de culture dans les stagiaires et les étudiants que nous recevons, mais au final, je ne vois pas de différences tangibles dans les résultats des uns et des autres. Le cas de l’ESNG a toujours été différent, à l’origine elle ne formait presque exclusivement que le personnel de l’IGN (ingénieurs des travaux carto et ingénieurs géographe (des X) – dont le corps a été récemment dissout et fusionner avec le corps des Ponts). À la fin des années 1990, l’école a pris la tangente de former des ingénieurs « civils ». Mais, il semble que les effectifs y restent bas et je me suis laisser dire que l’avenir même de l’ENSG pourrait être en question… ces décisions, 1ère année commune avec l’ESGT et 3ème année faite dans le cadre d’un master 2 existant : Grenoble, Paris, Str-Etienne, Orléans… sont des signes clairs.
Il n’y a pas à mon sens de guerre des écoles et il n’y aucune raison qu’il y en ait… Il n'y a surtout aucune raison d'en initier une dans le contexte de ce forum. En revanche, si débat il doit y avoir, c’est sur la notion même d’ingénieur en géomatique. Nous sommes ici, à Québec, confrontés à cette question. Notre premier cycle formait traditionnellement les arpenteurs-géomètres (géomètre-expert en France). La reconnaissance récente de notre second Bac par le Bureau Canadien d’Accréditation des Programmes en Ingénierie – BCAPI, nous a non seulement obligé à revoir les enseignements dans une perspective de conception en génie, mais aussi à nous questionner sur la différence entre un arpenteur-géomètre et un ingénieur en géomatique… la réponse n'est pas tranchée et j'invite les pannelistes et participants de la table ronde sur l'avenir du secteur lors du prochain Géoévènement à aborder cette question...
Dernière modification par Geodoc (Tue 04 March 2008 18:42)
Stéphane Roche
Université Laval, Québec, Canada
Hors ligne
#3 Tue 04 March 2008 17:14
Re: ENSG / ESGT : la guerre des écoles ?
Juste pour précision :
Le titre est une accroche pour attirer le chaland.
Je pense avoir suggéré assez clairement en conclusion que je trouve cette polémique un peu déplacée et essayé de centrer le problème sur les écoles, et pas l'ESGT / ENSG.
À vous, chaland du du GeoRezo d'orienter le débat comme il devrait l'être et ne pas vous attarder sur les bananes laissée par la CGT. Cette affaire est occasion à débat, mais personne ne nous oblige à raser les pâquerettes. Préparons le Géo-Évènement...
Jérôme Cuinet
L'avantage de la Chine, c'est que le soleil se couche plus tard !
Hors ligne
#4 Wed 05 March 2008 21:03
- Michel.Kasser
- Juste Inscrit !
- Date d'inscription: 5 Mar 2008
- Messages: 1
Re: ENSG / ESGT : la guerre des écoles ?
Lors du message du 27 février, j’ai senti comme une invitation à m’exprimer sur le rapprochement ENSG-ESGT en cours. J’ai effectivement beaucoup de choses à dire sur l’ESGT, ne serait-ce que sur les qualifications réelles qu’ont, pour en parler, ceux qui s’expriment sur son « niveau »,… et sur l’ENSG tout aussi bien, une école pour laquelle j’ai aussi beaucoup d’affection et, comme il se doit, aussi beaucoup d’attentes.
Un des fonds des problèmes rencontrés, c’est un travers bien de chez nous (je parle ici en tant que citoyen partiellement français…), dès qu’il s’agit d’enseignement, tout le monde est compétent, et bien entendu, chacun s’exprime bruyamment sur « sa » vérité, personne n’étant fondé à la contester. Or il s’agit de problèmes de haute technicité, et réellement je pense qu’aucune des personnes qui s’est permis des jugements définitifs ne connaissait plus que, disons 10 ou 20 %, du dossier. Je suis moi-même professeur des universités depuis 91, j’ai passé depuis lors une grande partie de mon temps sur le pilotage de l’ESGT puis de l’ENSG, et il m’a quand même fallu plusieurs années pour à peu près saisir tous les volets de ce projet de rapprochement. Je n’ai pas l’esprit tellement vif, mais quand même… Résultat, je ne pensais pas utile d’exprimer mon avis face à des séries de remarques faites sans fondement, par des gens qui s’expriment sans savoir (et sans chercher à savoir, ce qui est encore plus grave à mes yeux…), et qui sont heureux comme ça. Allons-y quand même…
Il y a pas mal de points qui méritent pourtant d’être rappelés, comme :
- le fait très négatif pour notre milieu professionnel d’avoir émietté les formations supérieures en autant de petits ensembles, aucun n’ayant une visibilité et donc une attractivité appréciable, ce qui nous met durablement en difficultés pour approvisionner ce secteur en jeunes bien formés en quantités suffisantes. Ceci pèse fortement sur la capacité d’expansion dudit secteur, et bien entendu, se traduit par une perte de compétitivité au profit d’autres pays mieux outillés.
- la dynamique de rapprochement actuelle ne fait que reproduire ce qui se passait déjà il y a encore 35 ans, et qui alors donnait toute satisfaction ! Faisons plutôt le procès de ces administrations qui ont sciemment coupé les ponts entre ESGT et ENSG, suite à quoi l’ENSG a été quand même le principal support technique de l’ESGT, officieux certes, mais pendant plus de 25 ans…
- le fait que les tutelles ont clairement exprimé depuis pas mal d’années le fait que l’ENSG devait être une école de la géomatique nationale, d’utilité générale, et gérée par l’IGN (parfaitement à sa place dans ce rôle, d’ailleurs), et non pas « l’école de l’IGN formant des élèves pour l’IGN ». Et donc l’ensemble des personnels techniques de l’IGN, anciens élèves de l’école, n’a pas encore pris le recul nécessaire pour intégrer ce concept plein de sagesse mais encore trop nouveau à leurs yeux.
Les difficultés techniques actuelles sont, enfin, en train de s’aplanir ces temps-ci. Il reste bien évidemment les craintes de quelques-uns, qui prennent toutes tribunes disponibles pour exprimer leurs angoisses, l’immobilisme étant paré de grandes qualités à leurs yeux. Je pense qu’il vaut sans doute mieux laisser dire, même si c’est contraire aux dérives médiatiques de l’époque, et quand même essayer de bien faire (et vu le travail à faire, il n’est pas trop évident de « faire » si l’on passe beaucoup de temps à « dire ») : à la fin, ce sont les résultats qui parleront d’eux-mêmes.
J’invite tous les protagonistes à regarder, comme moi-même, le coté extrêmement positif de ce projet de rapprochement, et à avoir en tête l’intérêt général qui, à long terme, est celui de tous nos établissements et de notre secteur d’activité tout entier. Ce sera un immense bénéfice national que de faire asseoir sur de mêmes bancs ceux qui vont ensuite faire carrière dans les différentes branches de la géomatique : c’est aussi à de telles situations qu’on doit, rappelons-le, l’excellence de l’industrie française en matière de télécoms, d’aéronautique, d’armement, etc. Nous avons enfin, à portée de la main, la possibilité de créer une dynamique positive dans notre secteur, saisissons-là et, sans se les cacher, nous résoudrons ensemble les difficultés de tous ordres que l’on rencontre toujours lorsqu’on fait évoluer une situation bloquée depuis longtemps. Pour tous, les professionnels, les enseignants, les élèves, etc. ce projet représente une chance historique d’agrandir notre horizon : on ne doit pas s’arrêter en route !
A votre disposition quand même pour en « dire » plus ?
Hors ligne